En jouant l’immersion plutôt que la rupture, ils ont dialogué avec le lieu pour révéler sa singularité : le grain.
Imaginer l’identité graphique d’un lieu est un exercice délicat qui se situe entre séduction et évocation, entre concision et communication. Conscients de ces enjeux, l’ambition d’Anne Piscaglia et de Guillaume Bullat du studio Voiture 14 était de s’inscrire dans la continuité des codes graphiques déjà établis pour le projet de la Collection Pinault à la Bourse de Commerce, tout en développant un univers singulier.
Il s’agissait ensuite de dialoguer avec le lieu, révéler la singularité du restaurant : le grain. Les mots et leur typographie ont été le terreau des graphistes. Ils ont d’abord récolté le vocabulaire du répertoire culinaire des grains de Michel et Sébastien Bras : avoine, fenouil, épeautre, azuki, fenugrec, moutarde… Puis, ils en ont patiemment élagué les lettres pour en recueillir ici l’œil d’un o, l’accent d’un e, la ponctuation d’un i, là, la larme d’un g, le pédoncule d’un r. Entre contre-formes et raffinements typographiques prit vie cette grainothèque surprenante qui devint système graphique. Appliquées en premier lieu au mot « grain », les germinations révélées dessinèrent le logo du restaurant. « Nous avons eu l’impression de revenir à la genèse de la formation de chaque lettre » s’émeuvent les designers.
Un univers discret et infini se décline, essaimé en pointillé, poinçonné, imprimé, tissé, brodé, pixelisé. Cette grainothèque s’installe dans le paysage, pare les bouteilles des « cuvée de grains » et les menus, anime les pages du site internet, prend place sur les couverts de la table et les vestes des cuisiniers qui arborent fièrement ce blason végétal. Un exercice d’essaimage que les designers graphiques s’appliquent à concevoir à quatre mains, sous les quatre yeux attentifs de Michel et Sébastien Bras avec qui ils collaborent depuis de nombreuses années.